Révélation du début de saison, Désiré Doué, tout juste âgé de 17 ans, ne cesse d’impressionner les supporters rouge et noir, mais aussi les observateurs du football français et international. Le profil de ce milieu de terrain semble unique dans l’effectif du Stade Rennais et son talent peut rapidement faire de lui un des éléments centraux de l’équipe cette saison...
Le football dans le sang
Né le 3 juin 2005 à Angers, c’est à l’âge de six ans que Désiré Doué rejoint les rangs du Stade Rennais. Il fait alors ses armes chez les équipes de jeunes et impressionne rapidement par ses qualités, à tel point qu’il se retrouve surclassé dans presque toutes les catégories. Jérémy Robert, ancien éducateur en U9 au club bretillien, affirmait dans le podcast RMC Scouting consacré à Désiré Doué, que ce dernier s’était rapidement vu attribuer un surnom : « phéno ».
Parmi les membres de l’équipe de Radio Roazhon, Marius Grébo a eu la chance d’évoluer aux côtés de Désiré Doué chez les jeunes du Stade Rennais. Interrogé sur son ami, il nous a confié qu’il a toujours « virevolté, tenté des sombreros ou des roulettes ». D’après ses dires, Marius n’est vraiment pas étonné de le voir aussi à l’aise dans l’élite.
Doué continue de progresser de manière constante. Il signe son premier contrat professionnel en avril dernier, avant d’être sacré champion d’Europe U17 deux mois plus tard, aux côtés de l’ancien rennais Mathys Tel notamment. Quelques semaines plus tard, le 7 août, il joue ses premières minutes en Ligue 1 contre Lorient. Il inscrit ensuite un superbe but face à Brest, fin août, pour devenir le premier joueur né en 2005 à marquer dans l’un des cinq grands championnats. Précoce.
Chez les Doué, le football est une histoire de famille. Son grand frère Guéla est, lui aussi, un joueur de l’équipe professionnelle. Yann Gboho, produit de la formation bretonne et parti cet été au Cercle Brugge, est quant à lui le cousin de Désiré. Anecdote sympathique : il tient son prénom de son oncle, Nourmandiez Désiré Doué, lui aussi lié au monde du football. En 2014, ce dernier devient le premier arbitre ivoirien à officier lors d’une rencontre de Coupe du Monde. Il était au sifflet de la rencontre opposant le Chili à l’Australie le 13 juin 2014 (victoire 3 à 1 des sud-américains). Quelques jours plus tard, il arbitrera le match de… l’Équipe de France face à l’Équateur, qui se soldera par un nul 0-0.
La fratrie Doué et leurs qualités de footballeur, Marius l’a récemment appris à ses dépens : « Il y a quelques semaines, je suis allé faire un soccer avec Guéla et Désiré, alors que c’était censé être leur jour de repos. On avait réservé un terrain que pour nous trois et pendant deux bonnes heures, on a joué. Ils m’ont tué et j’ai mis deux jours à m’en remettre ! » Vous êtes prévenus, les Doué ont la dalle.
Entre aisance technique et force physique
Désiré Doué est un milieu de terrain relayeur. Là où il est le plus à l’aise, c’est en tant que 8, voire en numéro 10. C’est d’ailleurs à ce poste que Marius le voit évoluer : « Cela permettrait d’exploiter au maximum son potentiel technique. » D’autant plus qu’on a affaire à un joueur porté vers l’offensive. Jérémy Robert évoquait sa capacité à se projeter rapidement dans les espaces, ainsi que son anticipation. José Alcocer, sélectionneur de l’Équipe de France U17, vante quant à lui sa qualité technique déjà de très haut niveau.
C’est d’ailleurs sur cette qualité technique que nous allons nous pencher. Désiré Doué est presque le seul milieu de terrain, voire un des seuls joueurs de l’effectif rennais aujourd’hui, à pouvoir éliminer ses adversaires en un contre un dans le cœur du jeu. Dans ce registre, Sulemana et Doku en sont également capables, mais davantage sur les côtés, grâce à leur explosivité. Selon Whoscored *, Désiré Doué tente en moyenne 2 dribbles par match et en réussit plus des deux tiers. Sur les plus de 300 joueurs de Ligue 1 présents dans ce classement, il se place au 52ème rang malgré un temps de jeu bien inférieur à de nombreux concurrents. Face à Auxerre, le jeune milieu de terrain a tenté un total de sept dribbles pour quatre réussis, soit le plus haut total du match, ce malgré sa sortie à la 74ème minute…
Cette qualité de dribbles et de percussion, les autres milieux rennais ne la possèdent pas, ou pas à ce niveau. Lovro Majer et Flavien Tait sont plutôt des joueurs capables de déstabiliser l’adversaire par des passes, qu’elles soient courtes et cassant les lignes, ou qu’il s’agisse de longues transversales. Doué apporte en ce sens une corde supplémentaire à l’arc rennais.
C’est également un joueur qui n’hésite pas à frapper. Il tourne à un peu moins d’un tir par match selon Whoscored, toujours malgré un temps de jeu relativement faible. Ses frappes sont quasiment également réparties entre ses deux pieds : une frappe sur deux sort de sa patte droite, l’autre de la gauche. Son but contre Brest illustre parfaitement ses qualités : le Rennais se saisit du ballon peu après la ligne médiane, l’emmène magistralement, élimine le défenseur brestois d’un dribble du droit puis décoche une frappe chirurgicale du pied gauche.
Au-delà de l’aspect technique, c’est peut-être la puissance physique que dégage ce garçon qui impressionne le plus. Du haut de son mètre 81 et de ses 79 kilos, Désiré Doué est solide et difficile à bouger. Souvent bousculé lors de ses premiers matchs, le milieu rennais reste debout malgré les tacles. Sa puissance lui permet d’intercepter 0,7 ballon par match et de se positionner à la troisième place des meilleurs récupérateurs rennais, derrière les immuables Benjamin Bourigeaud et Baptiste Santamaria.
Le chaînon manquant au milieu de terrain ?
Vous l’aurez compris, Désiré Doué est un joueur polyvalent. Capable de jouer en position de relayeur, voire de meneur de jeu, il est un fort dribbleur, frappe bien, est physique, et résiste dans les duels. Avec la blessure longue de Baptiste Santamaria, on se demande même si le jeune milieu rennais peut être amené à dépanner, voire plus, au poste de sentinelle. La question a été posée à Bruno Genesio en conférence de presse mercredi dernier, avant la réception du Fenerbahçe. Le manager rennais répondant que Désiré avait « les qualités pour évoluer à ce poste ». Pour Marius Grébo, « il est envisageable par la suite de le voir évoluer en 6 moderne à la Thiago Alcántara, mais je pense qu’il est encore un peu trop tôt et qu’il y a trop de gestes parasites dans son jeu pour ce poste à risque ». Affaire à suivre donc.
Pendant une grande partie du mercato cet été, les dirigeants ont été à la recherche d’un milieu de terrain « d’impact ». Les minces rumeurs qui évoquaient un intérêt du club pour Séko Fofana ont un temps fait rêver les supporters rennais… avant que le Lensois décide finalement de prolonger son aventure dans le Pas-de-Calais. Évidemment, Désiré Doué est actuellement loin du niveau de l’international ivoirien. Cependant, on se demande si, avec le temps, il ne pourrait pas devenir un de ces milieux capables de débloquer un match par une frappe, une course, une récupération ou une passe. Ses qualités sautent aux yeux et sa progression est visible à chaque match. Pour autant, il reste encore beaucoup de travail pour le jeune Désiré, à la passe par exemple, mais aussi dans son placement défensif, son sens tactique et sa capacité à donner le ballon avant de tenter le dribble de trop. Et, quand on voit le talent du garçon à seulement 17 ans, on se dit qu’il pourrait rapidement devenir un élément central du milieu du club et emmener avec lui le Stade Rennais vers des sommets jusqu’alors jamais atteints.
*Statistiques récupérées après le match contre Auxerre.
Jocelyn GOURIOU